Ne jetez rien de votre vie. Compostez tout !
Ceux qui ont comme moi la chance d’avoir un jardin potager, aménagent tout au fond, à l’abri des regards, un endroit destiné au compost. Là finissent toutes les épaves de ce qui a servi à préparer les repas, épluchures diverses… Vaste cimetière silencieux où pourrit et se décompose lentement ce qui a donné, protégé, fait pousser la vie. Un intense travail souterrain de digestion se met à l’œuvre dans ce tas de détritus. Lorsqu’il m’arrive de le sonder avec ma fourche, j’aperçois des milliers de vers de terre à l’œuvre, se régalant, semble-t-il, de nos reliefs abandonnés. Toutes ces petites bêtes recyclent cette pourriture peu appétissante et le transforment en terreau fertile qui fera le bonheur du jardinier. Même sans soins particuliers, la transmutation s’opère, et au bout de deux ans on peut prélever à pleine pelle un fertile terreau qui ira nourrir fleurs, salades, et délicieux légumes qui figureront sur notre table.
Remarquable illustration du principe fameux : rien ne se perd, tout se transforme. Le cycle de la vie se poursuit inlassablement.
Humainement parlant, nous sommes aussi, la vie durant, un singulier compost qui recycle une foule de chosesqui nous apparaissent comme des déchets de notre existence. De la mort sort une vie nouvelle qui nourrit l’être tout entier, corps, esprit et cœur ; ainsi va la vie spirituelle.
Tout est donc recyclable dans nos itinéraires. Rien n’est condamné à la stérilité et à l’inutilité. Tout, absolument tout, peut servir à notre croissance intime. La seule condition, c’est de consentir à la décomposition en nous de ces réalités qui nous gênent, blessent, pèsent,irritent, culpabilisent. Il faut être passé par cette expérience de compostage intérieur.
De la mort sort une vie nouvellequi nourrit l’être toutentier, corps, esprit et cœur ; ainsi va la vie spirituelle.
Nous n’aurons jamais fini de nous étonner de la puissance fertilisante de cet étrange terreau intime issu de la lente dissolution de nos misères et de nos épreuves. Seul, chacun peut témoigner de la vie inattendue que cet humus humain a engendrée en ses terres.
D’après Jacques Musset (tiré de son livre « Le potager, école d’humanité »)