Aller se promener…
Aller se promener est une mesure de précaution à prendre avant d’envoyer tout promener. ! Le grand air dégonfle l’esprit de sérieux, déploie l’âme qui se ratatine sur son sort, rallume l’imagination que tout emploie à éteindre.
Voir en grand, en large est une échappée possible à l’asphyxie de nos pensées. Celles qui tournent en boucle, s’entortillent sur elles- mêmes. En nous promenant, nous refoulons nos idées noires derrière la ligne d’horizon. La mer et les vents d’ouest chassent toutes les pensées négatives, quand les forêts semblent des couvercles sur les âmes.
La promenade n’est pas seulement une issue de secours ; elle constitue un voyage en modèle réduit. Comme toujours, seul le premier pas coûte : prendre ses bottes, prendre la porte, prendre l’air. Commencer, cela demande un geste ordinaire, efficace dans ses effets, susceptible de bouleverser notre existence : ouvrir une valise, quitter la table, éteindre son téléphone portable,s’enaller– La vie ne tient qu’à un fil. En général, il suffit amplement à nous ficeler !
Aller se promener est à la portée de chacun, un plaisir sans prix. Le temps est notre bien. On ne vit qu’une fois ! Raison supplémentaire de lever des vents contraires à notre course folle, de reprendre, quand cela nous chante, la maîtrise de notre allure.
La promenade réconcilie avec le temps qui passe. Sous nos pas déliés, les heures, les saisons, les années recouvrent leur ordre. L’espace que nous parcourons règle nos horloges intimes. Plus de décalage, pas d’urgence ni de retard, nous épousons la marche du temps.
Notre esprit oscille tel un pendule entre contemplation et rêverie. Nous sommes en nuances : concentrés et perméables au monde, distraits et retirés dans notre mer intérieure. Les tapages et les caprices de notre ego mis au pas, nous renouons un dialogue vrai et clair avec nous-mêmes. En paix.
D’après Cécile Guérard- « Philosophie légère de la mer » – Ed. des Equateurs